Résumé
Sylvana, une des aides familiales à intervenir chez Mme Pieters s'investit particulièrement chez la vieille dame qui elle aussi l'apprécie beaucoup. Ce n'est pas la seule professionnelle à avoir ainsi pris son rôle à cœur chez Mme Pieters (pour un autre exemple, voir 7.6), ce qui est analysé à la p.172 comme un cercle vertueux auquel contribue l'ensemble des protagonistes du soin.
Description
- Types d'acteurs :
Aide familiale
- Type d'acte :
Aide à la vie journalière
- Thème(s) :
- Concept(s) :
Rites d’interaction, Système d'agentivité
- Lieu d'observation:
Domicile
- Région d'observation:
Bruxelles
- Pseudo:
Mme Pieters
- Date d'observation:
juin 2012
- Numéro de page du livre :
172
- Auteur du récit :
Natalie Rigaux
Contexte
Mme Pieters vit à la périphérie d'une petite ville wallonne, dans un quartier de maisons trois façades semblant dater de l'après-guerre. C'est « depuis toujours » (c'est-à-dire, quelques années après son mariage) que Mme Pieters vit là, d'abord avec son mari et leurs sept enfants, puis seule depuis son veuvage et le départ des enfants. Son mari a été « simple employé » de la fonction publique, puis a gravi les échelons, ce qui lui donne accès à une pension confortable. On sent dans ses propos une imprégnation par le monde catholique : elle a été dans une école catholique, ses enfants ont été aux scouts catholiques, elle cultive un sens du don marqué par la tradition chrétienne.
Elle a 83 ans lors de notre première rencontre en décembre 2011. Cela fait alors deux ans que suite à une hospitalisation (pour cause de mauvaises prises de médicaments), elle a reçu un diagnostic de maladie d'Alzheimer. Depuis, différentes aides professionnelles se sont progressivement mises en place : une infirmière pour veiller à la prise des médicaments et faire la toilette tous les matins ; un service traiteur tous les midis ; des aides familiales deux fois par semaine pour les courses et la mise en route du matin ; un centre de jour deux jours par semaine ; une aide-ménagère une fois par semaine. Par ailleurs, certains de ses enfants interviennent activement : Jacques, un des fils de Mme Pieters, passe tous les soirs, une de ses filles deux fois par semaine et elle va souper un soir par semaine chez un autre de ses fils.
Jacques est la personne de contact des services présents chez sa mère, ce qui on le devine n'est pas rien vu leur nombre et l'ajustement régulier nécessaire, lui également qui est en première ligne pour repérer les problèmes et les solutions à mettre en place. Il est rare qu'un fils soit ainsi en première ligne de l'aide.
Contexte Méthodologique
Je rencontrerai Mme Pieters à quatre reprises entre décembre 2011 et juillet 2012 (avec ses filles, le kiné, deux aides familiales différentes). J'assisterai à une réunion de l'équipe des aides-ménagères, des infirmières et des aides familiales qui interviennent chez elle. Je rencontrerai son fils Jacques pour un entretien. Elle sera institutionnalisée en septembre 2012, suite à une décision de ses enfants ayant fait l'objet de multiples discussions et de tensions dans la fratrie.
Vignette
Le
jour où Sylvana et moi nous passons pour « la mise en route » du
matin, après une tasse de café, celle-ci annonce qu'elle va aller faire le lit
de Mme Pieters. Celle-ci l'interpelle : « Tu te souviens, quand tu
avais dû tout changer ? Je n'avais
pas su me retenir et il y en avait eu partout, ça avait été terrible. »
Mme Pieters raconte cela aujourd'hui avec reconnaissance, sans honte, ce qui me
semble d'autant plus remarquable que Sylvana me racontera ensuite à quel point
ce jour-là madame avait été meurtrie et gênée de ce qui était arrivé. Avant que
nous partions, Sylvana propose : « Je vous amène votre peigne pour
que vous fassiez vos cheveux ? Comme ça, vous êtes toute belle pour
partir ! » C'est un jour où Mme Pieters se rend au centre de
jour ; elle a effectivement les cheveux en pétard et j'admire cette
attention de Sylvana à la tenue de Mme Pieters que celle-ci accepte volontiers,
tant sans doute elle perçoit comme moi toute la sollicitude légère de Sylvana.
Jacques est très reconnaissant à l'égard de Sylvana ; c'est lui qui m'en a
parlé lorsque je l'ai rencontré et je lis ce jour-là au cahier de liaison un de
ses messages : « Ma mère est très contente, vous êtes
formidable ! ».
Comme avec Élise, cela
reste bien une qualité particulière de relation à l'initiative de sa mère et de
la soignante dans laquelle il n'interfère pas, sauf pour exprimer sa
reconnaissance.