3. La routinisation de la journée   (Chapitre 4)  Imprimer
Résumé
Mr Paquot décrit ses journées, toutes entières structurées par le passage des soignant·e·s et des soins à donner. Cette routinisation de l'emploi de son emploi du temps sera analysée comme le résultat d'un rapprochement inattendu que l'on peut faire entre le domicile et l'institution totale (Goffman).
Description
  • Types d'acteurs : Proche
  • Type d'acte : Soins intégrés
  • Thème(s) : Rythme de vie des proches
  • Concept(s) : Institution totale
  • Lieu d'observation: Domicile
  • Région d'observation: Bruxelles
  • Pseudo: Mme Paquot
  • Date d'observation: septembre 2011
  • Numéro de page du livre : 99
  • Auteur du récit : Natalie Rigaux
Contexte
Mme Paquot ne parle plus depuis plusieurs années, de temps à autre – rarement – un son s'échappe de sa bouche. Elle a été diagnostiquée malade d'Alzheimer treize ans auparavant et a 83 ans lorsque je la rencontre (monsieur 79). Depuis une chute ayant entraîné une fracture de la hanche il y a 5 ans (et pour laquelle elle a fait un séjour dans une unité de revalidation), elle ne marche plus et ne tient debout qu'avec une aide importante, proche du portage. Depuis lors, des infirmier·ère·s passent deux fois par jour pour faire la toilette de madame, la lever et la coucher. Un kiné vient deux fois par semaine pour la mobiliser, des aides familiales au même rythme pour faire les courses essentiellement et un kiné respiratoire quotidiennement sauf le week-end avec une machine facilitant l'élimination des glaires. Le couple a eu deux enfants, un fils chirurgien dont monsieur me parle avec fierté, qui a lui-même 4 enfants et joue un rôle important pour identifier les soins requis, et une fille en institution de soins depuis un accident grave qui l'a laissée invalide. Monsieur ne m'en parlera que lors du premier entretien. Mr Paquot a été gendarme, en retraite depuis 25 ans, madame couturière jusqu'à la naissance de leur deuxième enfant.
Contexte Méthodologique
J'ai été mise en contact avec les Paquot par le service infirmier qui y intervient. Mes sources sont constituées d'un entretien avec monsieur en septembre 2011, suivi de deux observations, une en octobre 2011, lors du passage d'une infirmière pour la toilette et du kiné respiratoire (deux heures), l'autre en avril 2012 lors de l'intervention du kiné travaillant la mobilité de Mme Paquot (30 minutes). En décembre 2011, j'ai participé à une réunion de l'équipe infirmière intervenant chez les Paquot. Divers coups de fil (avec Mr Paquot et les infirmières/kiné) ont préparé ou suivi ces temps d'observation.
Vignette
Mr Paquot me raconte ses journées : « Je me lève à 6h, je fais ma toilette. Je prépare ses médicaments et une tartine que je lui donne à 7h, pour qu'elle soit prête quand le kiné des jambes arrive à 7h30, puis pour la toilette à 8h. Vers 9h, le kiné respiratoire arrive. Quand ils sont partis, je nettoie, je fais à manger et je lui donne son repas à 11h, comme elle n'a eu qu'une tartine à 7h. On mange ensemble, à la cuisine. Après, je la mets sur son lit pour la changer, puis je la ramène au fauteuil. Je m'arrange pour rester près d'elle l'après-midi. Je lui refais des aérosols à 15h, 18h et 22h. Je lui donne son souper à 16h, moi là, je mange plus tard. C'est pour qu'elle soit prête quand les infirmiers viennent pour la mettre au lit vers 17h. S'ils ne sont pas là à 17h30, je la mets au lit tout seul. Quand je lui ai donné l'aérosol de 18h, je soupe et je regarde la télé. Cela ne la dérange pas, elle est dans son lit, elle se repose. A 22h, je lui fais son dernier aérosol, je la change. Le temps de tout ranger, je suis dans mon lit vers 22h45. »