- Types d'acteurs : Proche
- Type d'acte : Surveillance
- Thème(s) : Manière de voir et de vivre avec la personne, Respect des préférences
- Concept(s) : Agentivité, Expérience
- Lieu d'observation: Domicile
- Région d'observation: Bruxelles
- Pseudo: Mme Donckers
- Date d'observation: décembre 2011; janvier et décembre 2013
- Numéro de page du livre : 44;93-94
- Auteur du récit : Natalie Rigaux
Lorsque je le rencontre seul, Mr Donckers me parle longuement du fait que les médecins n'ont pu comprendre la cause des crises d'épilepsie ni mettre d'« étiquette » sur les troubles dont elle souffre. Néanmoins :
« Ils ont tout de suite constaté qu'au point de vue neurologique, elle était fort abîmée, entre guillemets[1]. (…) Et puis de toute façon, il n'y a rien à faire, elle ne se rend plus compte. C'est vraiment, bon je lâche le mot, c'est de la démence ! Parce qu'elle fait des choses absolument aberrantes, faut vraiment qu'on la surveille constamment. Surtout par exemple quand elle va dans la cuisine, parce qu'elle veut toujours aider mais seulement elle va peut-être mettre de l'huile pour faire la vaisselle, ou des choses comme ça. »
Me frappera lors de nos deux rencontres ce stress permanent de Mr lorsque sa femme est présente et son souci de contrôle perpétuel. Par exemple :
« Dès que je la quitte des yeux, elle fait n'importe quoi. Des détergents dans le surgélateur par exemple. Après coup, je me dis qu'il y a peut-être pire dans la vie. Mais je ne suis pas tranquille quand elle n'est pas à côté de moi. »
Ou lorsqu'il me parle de la journée hebdomadaire qu'ils passent avec sa belle-sœur, il me parle à la fois du plaisir qu'elle y prend – on y revient – mais aussi du bien qu'il y trouve :
« Mais oui parce que sa sœur s'en occupe. Alors moi, je suis beaucoup plus relaxe parce que je sais que je ne suis pas le seul à la surveiller. »
Même lorsque son épouse monte se coucher – généralement tôt, vers 21H, me dit Mr – il préfère « être présent » et se coucher aussi, bien que son épouse ne se soit jamais relevée.
J'observe cette surveillance à l'œuvre lors de l'entretien où ils sont tous les deux présents :
Pendant tout l'entretien, Mr est assez stressé, l'empêchant de faire ce dont elle a envie – prendre le livre qu'il a amené sur la table autour de laquelle nous sommes tous les trois installés, mettre des sous-verres dans l'album photos. Je le vois à ses petits gestes nerveux, qui arrêtent son bras lorsqu'elle veut prendre, ou au timbre de sa voix lorsqu'il lui demande de se rasseoir, alors qu'elle fait mine de se lever.
[1] Mr m'expliquera qu'il est vraisemblable que les altérations cognitives avaient déjà commencé avant les crises d'épilepsie, sans être comme telles identifiées.